«Une bonne signalisation serait quand même bienvenue»

| mar, 06. aoû. 2019

PAR XAVIER SCHALLER

Parking du Gros-Mont, dimanche peu avant midi. La scène se répète à l’envi. Petite phrase d’introduction: «Bonjour, Natacha Durussel. Je suis engagée par le Parc naturel régional Gruyère Pays-d’Enhaut et la commune de Val-de-Charmey.» Suivie de la petite morale: «Il est maintenant interdit de parquer côté pente. Il faudrait laisser la voiture en bas et monter à pied. Il y a un nouveau sentier.»

Ranger diplômée (voir encadré), Natacha Durussel doit sensibiliser, en alternance avec trois collègues, les promeneurs aux nouvelles règles en vigueur au Gros-Mont. «Tant que le parking n’était pas plein, ça allait. Mais là, c’est le stress.» D’autant qu’un groupe de voitures vient de se parquer du mauvais côté. «Ils m’ont affirmé qu’ils allaient se recueillir à la chapelle pour un décès et qu’ils n’en avaient que pour une petite heure. Qu’est-ce que vous voulez leur dire? Mais je dois expliquer aux autres qu’ils ne peuvent pas faire la même chose.»

Même si elle précise bien qu’il s’agit d’information et que les éventuelles amendes ne viendront que plus tard, les automobilistes jouent le jeu. Plusieurs affirment ne pas avoir vu le panneau en bas. D’autres disent avoir tenté leur chance: «Il faudrait savoir quand il y a des places et quand il n’y en a pas. D’autant que la route d’accès n’est pas facile.»

Prendre la température

Relayer remarques et propositions des usagers fait aussi partie du travail de Natacha Durussel. Comme annoncé cette semaine dans l’Echo de Val-de-Charmey, la commune veut «évaluer la possibilité de prendre de nouvelles mesures à l’avenir: légalisation de la traversée à vélo Gros-Mont - Ciernes-Picat, tarification du parking du Haut du Mont, mise en place de bus navettes».

Une fois la situation calmée, la ranger descend par la route, arrêtant les véhicules au passage. Petite phrase d’introduction, petite morale et demitour. Sauf pour Pascal Rausis. «Je suis responsable de la cabane des Marindes pour le Club alpin suisse (CAS). Alors j’ai la clé de la barrière qui est au bout du parking.»

Comme il doit trouver des gardiens bénévoles du 1er juin au 6 octobre, la réduction du nombre de places l’inquiète. «S’ils doivent parquer aux Invouettes, le problème est réglé. J’aurai personne.» Même le stationnement en bas des escaliers du Mont pourra en refroidir quelques-uns. Natacha Durussel prend note. «Le problème est le même avec ceux qui viennent aider pour faire les foins. Ce sont des choses encore à discuter.»

Sensibilisation aux règles

Quand elle en a le temps et que les personnes l’acceptent, Natacha Durussel propose un questionnaire plus complet. Il traite de la mobilité, mais également des règles spécifiques aux réserves naturelles.

La Marlinoise Cécile Pasquier et le Bullois Alain Bauer se prêtent au jeu. Si le terme de district franc ne leur dit rien – ce sont des réserves de faune sauvage, ils connaissent les principales règles à respecter, ainsi que la flore et la faune emblématiques du lieu.

Concernant la mobilité, ils seraient prêts à payer pour le parking. «Cinq francs la journée, ce serait honnête, du moment qu’il y a un service rendu», indique Alain Bauer. «Une bonne signalisation serait quand même bienvenue, renchérit Cécile Pasquier. Là, c’est un peu le bordel.» Elle pense notamment au sentier, qui a été aménagé pour éviter les lacets de la route, mais qu’aucun panneau n’indique.

Un seul bon élève

Ne lui parlez pas de bus navette: «Je jongle déjà avec des horaires toute la semaine. S’il faut aussi le faire ici, je re nonce.» Un argument que Natacha Durussel a déjà pas mal entendu. «Si c’est pour qu’elle monte presque vide, ce n’est pas tellement écologique», ajoute Alain Bauer. En descendant, la ranger dénombre les voitures parquées dans les lacets. Une pratique qui pourrait aussi être interdite. En fait, le seul bon élève rencontré cet après-midilà, c’est François Tissot, de Cerniat. Le seul à s’être parqué en bas des escaliers, sans tenter la montée. «J’ai lu l’information dans l’Echo de Val-de-Charmey, alors je fais comme il est demandé. Je marche beaucoup, alors pour aller aux Marindes, ça ne me gêne pas.»

C’est la deuxième fois qu’il vient cette semaine. «Le nouveau sentier est très joli, mais il pourrait être mieux indiqué. La première fois, je l’ai perdu un bout.» Une navette? «Peutêtre que je la prendrais en rentrant, si je suis très fatigué.» ■


«Croyez-moi, je suis un ranger»

Depuis 2007, le Centre forestier de formation (CEFOR), à Lyss, délivre un diplôme de ranger. Et depuis 2016, cette formation d’une année est également proposée en français un an sur deux. Natacha Durussel a fait partie de la deuxième volée. Au Gros-Mont, elle arborait un T-shirt Swiss Rangers, avec la devise «Trust me – I am a ranger», que l’on peut traduire par «Croyezmoi – je suis un ranger».

«La profession n’est pas encore très connue en Suisse romande, constate Natacha Durussel. On peut rarement en vivre.» Infirmière à Estavayer, elle partage son temps entre les soins à domicile, quelques mandats de ranger et du bénévolat pour Pro Natura. «Pour commencer la formation, il faut obligatoirement avoir une activité régulière en lien avec la nature.» Sa volée comptait quatre femmes et 14 hommes, réunissant aussi bien des paysagistes que des chasseurs ou des pêcheurs.

En Suisse, le métier n’est ni réglementé ni protégé par un diplôme fédéral. Mais l’association Swiss Rangers s’investit pour la reconnaissance de ces professionnels. Sur site, elle explique que «les rangers protègent la nature des dommages causés par les activités humaines et la favorisent en même temps». Ils apprennent à communiquer de manière proactive, pour informer, sensibiliser ou appliquer des interdictions – mais sans jouer ni les policiers ni les gardes-faune.

Les rangers peuvent aussi participer à la mise en œuvre de mesures visant à guider les visiteurs, à la conservation des espèces, à l’entretien des infrastructures, ainsi qu’à des comptages et des programmes de monitoring. XS


Les mesures annoncées

Le trafic dans la vallée du Gros-Mont crée de nombreuses difficultés, notamment de cohabitation entre agriculteurs et visiteurs. La commune de Val-de-Charmey a décidé de traiter le problème de manière globale, avec un concept de mobilité élaboré en collaboration avec le syndicat d’alpage du Gros-Mont, les propriétaires privés, l’Office du tourisme, Pro Natura, La section Gruyère du Club alpin suisse et le Parc naturel régional Gruyère Pays-d’Enhaut.

Les mesures prévues ont été expliquées dans LaGruyère du 11 mai, après que la commune a mis à l’enquête le réaménagement du sentier des escaliers du Mont – aujourd’hui ouvert, il permet un accès pédestre plus rapide au Haut du Mont. Ces mesures ont été officialisées dans le dernier numéro de l’Echo de Val-de-Charmey.

Outre le nouveau sentier, les mesures comprennent la limitation du nombre de places de parc au Haut du Mont (60 au lieu de 90). Il est désormais interdit de stationner du côté de la pente et l’interdiction devrait s’étendre jusqu’aux derniers virages des escaliers du Mont. Quatre rangers ont été mandatés pour informer et sensibiliser les visiteurs, douze fois en tout, en leur rappelant également les règles liées à cet espace protégé.

De nouvelles mesures vont aussi être examinées, comme la légalisation de la traversée à vélo Gros-Mont - Ciernes-Picat, la tarification du parking du Gros-Mont et la mise en place de bus navettes. XS 

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