PAR JEAN GODEL
La prochaine Fête du travail aura un petit arrière-goût amer pour les 800 employés de Liebherr Machines Bulle SA (LMB): dès le 1er mai 2012, ils travailleront 42 heures par semaine, soit deux de plus qu’auparavant (+5%). En contrepartie, ils recevront une augmentation de salaire de 2,5%.
«Les causes sont claires: c’est la perte de valeur de l’euro face au franc suisse», explique Claude Ambrosini, confirmant une information de La Liberté. Le directeur de LMB rappelle que son entreprise livre la quasi-totalité de sa production dans la zone euro. Le fait que Liebherr se fournit en grande partie dans la même zone ne suffit pas à compenser les coûts de production, dont les salaires, plus élevés en Suisse. «Pour les payer, je reçois 30% de moins qu’avec un euro à 1 fr. 60.»
En plus du salaire, LMB fournira un effort en matière de prévoyance professionnelle (2e pilier). Pour faire face à l’accroissement de l ’espérance de vie, la caisse de pension de l’entreprise a décidé une baisse du taux de conversion appliqué au capital épargne. Pour maintenir le niveau des rentes, une hausse des cotisations sera donc nécessaire: LMB la prendra intégralement en charge. «Nous assumons nos responsabilités puisque, au final, nous paierons 80% des deux heures demandées, calcule Claude Ambrosini. Le solde non payé représente vingt-quatre minutes par semaine, soit moins de cinq minutes par jour.»
«Les ouvriers ont bon dos»
Du côté syndical, on restait prudent hier, n’ayant pas encore tous les documents en main. Mais Armand Jaquier, secrétaire régional d’Unia Fribourg, dénonce une décision unilatérale prise sans consultation externe: «On n’a pas mis sur la table tous les documents qui prouveraient la nécessité d’une telle mesure. Et que je sache, Liebherr n’annonce pas de baisse des dividendes à ses actionnaires ni une chute de ses actions. Les travailleurs ont bon dos.»
Armand Jaquier craint aussi un non-respect des procédures face à ce qu’il assimile à une modification du contrat de travail. Il prendra contact rapidement avec le personnel pour en savoir plus.
«Nous avons averti le Service public de l’emploi qui a jugé conforme notre proposition», rétorque Claude Ambrosini. Par ailleurs, cette mesure, préparée depuis la fin septembre, a été prise de façon concertée avec la commission du personnel qui l’a acceptée à une «large majorité». «C’est un bon compromis», résume le directeur.
Ces dernières années, LMB a vu son activité évoluer en dents de scie. Après une baisse de 50% du chiffre d’affaires en 2009 (rattrapée dès 2010), puis le recours au chômage partiel et même 27 licenciements, l’entreprise a engagé plus de 80 nouveaux collaborateurs entre 2010 et 2011. «Il y a du travail, reconnaît Claude Ambrosini. Mais nous ne sommes pas des profiteurs. Si je l’étais, je ne pourrais pas me regarder dans la glace! Nous devons simplement lutter contre les pays qui nous entourent.»
Quant à un éventuel retour aux 40 heures, il n’est pas à l’ordre du jour: «Aujourd’hui, c’est illusoire. Nous devons maintenir une production concurrentielle. Ces deux heures supplémentaires nous y aident.»
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