Agritourisme ou le fatras d’un marché en effervescence

| jeu, 26. jui. 2012
L'agritourisme, un créneau touristique tendance qui part dans tous les sens. Il faut systématiser la qualité des offres pour mieux les communiquer. En Gruyère, le secteur doit encore se développer et les prestataires doivent être répertoriés.

PAR GILLES DE DIESBACH


Un magnifique bouvier bernois attend l’arrivée des visiteurs sous le porche, au-dessus de la grange. A côté, un jardin en fleurs, entretenu avec amour, borde la porte d’entrée de la vieille ferme de Nicole Mantel. Sa façade bleue lui donne des airs de conte de fées. Un paradis à Montbovon.
«Ça devient une petite industrie», explique la propriétaire des lieux, d’origine anglaise. Depuis sept ans, elle a transformé son habitat en «bed and breakfast». Nicole Mantel y travaille tout l’été, accueille sans relâche des clients dans les trois chambres qu’elle a aménagées à l’étage. Elle affiche complet depuis longtemps déjà. Sans qu’elle y ait vraiment réfléchi, ce qu’elle fait s’appelle de l’agritourisme.
Avec le regain d’intérêt de la population suisse pour ses traditions, ce domaine d’activité touristique a le vent en poupe. Les buvettes d’alpage, chambres d’hôtes en campagne, dortoirs sur la paille, activités à la ferme et produits du terroir sont de plus en plus sollicités, notamment par les citadins, qui rêvent du calme des verts pâturages. En Gruyère, les offres commencent à voir le jour un peu partout. Mais l’agritourisme, c’est quoi exactement? Petit état de la situation, à commencer par le niveau national.


Naissance d’une marque
Agritourisme suisse, c’est la réunion de trois associations actives sur tout le territoire helvétique: Vacances à la ferme, Aventure sur la paille et Vacances à la campagne Suisse (tourisme-rural.ch). «Notre idée est de finaliser la fusion de ces trois associations en 2014, explique Oliver von Allmen, directeur d’Agritourisme suisse. Puis, de mener plusieurs opérations de marketing et de publicité ciblées, qui ont d’ailleurs déjà commencé ce printemps.»
Dans les mois qui viennent, un site internet professionnel remplacera l’actuel. La priorité: donner du corps au terme agritourisme, pour en faire une marque. «Oui, j’ai du pain sur la planche», confirme Oliver von Allmen, car l’association a officiellement tout juste une année. Tout est à faire! Il est heureux de pouvoir compter sur le soutien de Suisse tourisme et de SuisseMobile pour établir des offres de qualité et les diffuser.
Le directeur collabore également avec de nombreuses associations agricoles et est en contact régulier avec l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG). Actuellement, Agritourisme suisse recense 600 prestataires. L’objectif est d’en trouver 400 de plus d’ici deux à trois ans.


Marché en émergence
Seuls une petite dizaine de prestataires gruériens figurent au catalogue. Pourtant, «il y a un vrai potentiel, car l’image de la Gruyère colle très bien à l’agritourisme», atteste Fabien Mauron, directeur de La Gruyère Tourisme (LGT).
D’accord, mais la Gruyère manque-t-elle véritablement d’offres? Sur la route qui mène de Broc à Charmey, les panneaux «chambres d’hôtes» pullulent. Depuis qu’elle s’est lancée, Nicole Mantel a vu des voisines faire de même, sans que cela lui pose problème. Elle se dit même soulagée de pouvoir leur envoyer des clients lorsqu’elle est surchargée.
Mais très peu de ces nouveaux venus figurent dans un registre officiel et ils restent quasiment introuvables. Raison pour laquelle Patrick Rudaz est en train d’inventorier les prestataires déjà en activité dans les 14 communes membres du Parc naturel régional Gruyère Pays-d'Enhaut (PNR) dont il est l’un des coordinateurs. Une commission agritourisme a d’ailleurs été créée au printemps dernier pour développer le créneau dans la région. «Nous en sommes encore aux prémices», note Patrick Rudaz, ce que confirme le directeur de LGT.
Bref, tout le monde s’engouffre donc sur ce marché, sans que, pour le moment, une institution faîtière ne le chapeaute véritablement. Le consommateur, lui, ne sait plus où donner de la tête. Certaines adresses ne figurent pas dans des registres tenus par Agritourisme suisse, alors qu’elles sont présentes sur le site internet de La Gruyère Tourisme. Un manque d’unité qui peut compromettre la qualité des offres. Bref, c’est le fatras, «propre aux marchés émergents», selon Patrick Rudaz.


Priorité à la qualité
«On a besoin d’une ligne claire, et surtout d’informations», souligne Fabien Mauron, qui, en attendant des instructions fédérales, surfe avec les outils à disposition. De son côté, Oliver von Allmen a mis la priorité sur l’élaboration d’un système de qualité. «Nous essayons de trouver une solution pour couvrir tous les acteurs du marché, et parallèlement, aiguiller le consommateur vers des offres claires et précises.» Cela passera notamment par la mise en place d’une plate-forme de réservations sur internet et par des contrôles de qualité.
Nicole Mantel, tenancière membre de l’association Vacances à la campagne Suisse, donc d’Agritourisme suisse, est bien loin de toutes ces préoccupations. Certes, elle n’apprécie pas l’idée que son établissement soit l’objet de contrôles réguliers. Les labels ne l’intéressent pas. Elle fonctionne surtout au feeling. «Vous arrivez à gagner la confiance de tout le monde autour d’une table», explique-t-elle. Elle laisse aux autres le soin de diffuser correctement son offre, peu importe où elle figure.

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